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Le 7 octobre 2021

Mamadou : « À mes maîtres »

C’est cette fois-ci à Habitat Jeunes Béthanie (Lille), que le journaliste Pierre Duquesne a été en juin à la rencontre de résidents pour animer des ateliers d’écriture et recueillir leurs témoignages.

Nous vous invitons à découvrir le texte de Mamadou.

Aujourd’hui, Mamadou est un brillant doctorant en Aménagement et Urbanisme. Il met ses compétences au service de la recherche française, au sein du laboratoire Territoires, Villes, Environnement et Société de l’université de Lille. Son « amour de la connaissance », il le puise de sa plus tendre enfance et de l’admiration de ses enseignants de l’école Notre Dame, à Guinguinéo, au centre-ouest du Sénégal.

Joe Sambou.

Pierre Guorgui Diouf.

Jean Simon Diémé.

Maurice Alassane Gueye.

Léon Samba Sarr.

Pierre Moussa Sarr…

Ils étaient mes enseignants du CI au CM2, à l’école primaire. Je me rappelle parfaitement d’eux. Je les admirais tellement. À six ans, mon père m’inscrit à l’école Notre Dame de Guinguinéo, une école catholique à Guinguinéo dans la région de Kaolack située au centre ouest du Sénégal.

Ces professeurs m’ont tous marqué. Je me voyais à leur place le soir à la maison. Je les suivais méticuleusement dans leurs moindres faits et gestes. Je me souviens de la préparation des fiches de cours le soir à la correction des cahiers de devoir, de composition. Je me souviens de l’approche pédagogique qu’ils adoptaient pour des matières comme le vocabulaire, l’orthographe, l’arithmétique ou encore le système métrique, des exemples qu’ils évoquaient souvent d’un ton taquin pour animer les séances de cours jusqu’aux gestuels et déplacements dans la salle dès lors qu’ils entraient dans une explication plus poussée. Encore aujourd’hui comme si c’était hier, je me souviens des exemples évoqués en vocabulaire avec l’apprentissage des mots « copieux », « vacarme »… Je ne laissais rien passer.

En bon observateur, je reprenais le rôle d’enseignant une fois à la maison le soir. Vers 18h-19h, je  préparais des fiches à mon tour pour dispenser à mes frères et sœurs ce que j’avais accumulé comme connaissances depuis des jours, qu’il s’agisse d’histoire ou de géographie, de grammaire, d’orthographe. Mieux encore, pour augmenter ma charge de travail à cet âge, je me plaisais à organiser des compositions pour pouvoir corriger des copies en masse. Des amis de mes frères et sœurs venaient réviser à la maison le soir. C’était l’occasion de dérouler des séances.

J’ai été attiré par l’enseignement très tôt.

Celui que j’admirais le plus, c’est Monsieur Pierre Moussa Sarr en classe de CM2. C’est celui qui m’a fait aimer la langue française. Par la manière dont il maniait la langue, par son caractère posé, par sa belle voix lorsqu’il s’agissait de chanter, par sa pédagogie, par son caractère « très humain », son indulgence, il incarnait l’archétype d’un enseignant « complet » au sens strict du terme. Un enseignant qui avait l’amour et la passion du métier. Au collège, j’ai continué à lui rendre visite jusqu’à ce qu’on se perde de vue avec le déménagement de mon père pour motif professionnel. Ce n’est que très récemment que j’ai eu vent de son décès via les réseaux sociaux.

Aujourd’hui avec le recul, je mesure toute l’influence que ce Monsieur a eu sur la suite de mon cursus, encore aujourd’hui. J’ai remporté d’innombrables concours de dictée au collège. La qualité de l’enseignement du français dans les écoles catholiques était connue et reconnue au Sénégal. Avec toute la modestie et l’humilité requises, au collège, au lycée, à l’université, mes profs ont continué de pointer et d’apprécier mon style rédactionnel. Très à l’aise à l’écrit comme à l’oral, ce n’est pas pour rien que j’ai aujourd’hui choisi la voie de l’enseignement et de la recherche.

La passion de l’enseignement et mon amour de la connaissance, du savoir, de l’écrit constituent le carburant qui mène vers ce chemin d’aventure si long et si sinueux parsemé d’embûches. Par ce texte, je tenais vivement à vous rendre hommage cher Maître et globalement à tous les enseignants et professeurs que j’ai eus à côtoyer durant toutes ces années.

Mamadou dit Papa Dieng